Écheveaux

2003


Hyvinkää, Hyvinkään taidemuseo


Installation sonore pour plusieurs hauts parleurs
1 enregistrement sonore.

Écheveaux donne voix à la pensée de Helene Schjerfbeck. Diffusée à certains endroits de l’Institut, un enregistrement propose la lecture en finnois de plusieurs extraits de la correspondance de l’artiste. En conformité avec l’esprit de l’exposition, ces textes abordent plusieurs de ses grands thèmes esthétiques et philosophiques. Y est tout autant question du processus de création artistique et de sa perception par le spectateur que de l’écoulement du Temps et des craintes qu’ils suscite.

La lecture privilégie un mode fragmentaire. Aériens et volatils, les textes se déploient sous la forme de lambeaux épars, de bribes plus ou moins audibles et compréhensibles pour le visiteur finnophone.

A travers la nature intime des textes qu’elle entrecroise, l’installation commente la propension de l’œuvre d’art à livrer une part de l’identité de l’artiste qui l’a élaborée. L’œuvre n’est pourtant pas simple reflet comme tendrait à le souligner trop fortement la démarche d’auto-figuration de l’autoportrait. Elle est une instance qui communique au-delà des cadres que posent le Temps et les sujets. A sa façon, l’installation transpose ce processus d’échange entre l’œuvre et le visiteur qui vient la regarder : une expérience qui, comme le souligne les lieux où sont diffusés l’enregistrement sonore, accompagne celui-ci bien au-delà du moment de la confrontation.

En raison de son principe de morcellement, Écheveaux rejoint le dispositif commun de M-Helene et Le Temps suspendu. Complémentaires à ce dernier, les enregistrements proposent du Temps un nouveau tressage qui vient converser avec les fragments que constituent les autoportraits figurés dans différentes installations de l’exposition. En apparentant les œuvres de Schjerfbeck à des lambeaux de pensée, Écheveaux rappelle comment chacun des éléments de la série rend compte d’un état d’esprit de sa créatrice, comment il communique la couleur d’un moment de son Histoire à travers la marque qu’il appose sur l’écheveau du Temps.

Il est dans la dynamique des sons et dans leur mode de diffusion quelque chose qui s’apparente à des déplacements d’oiseaux. En affleurant à l’esprit du visiteur, les intonations d’une voix peuvent rappeler les battements d’ailes d’un volatile, des murmures comparables à ceux que perçoit Melanie à la fin de The Birds, au moment où elle se déplace, avec sa lampe de poche, dans l’obscurité de la maison des Brenner pour se rendre dans la chambre où elle se fera agresser.

Ce traitement sonore, qui rend hommage au travail d’Alfred Hitchcock et de Bernard Herrmann, souligne comment, en se rappropriant les autoportraits de Helene Schjerfbeck, le cinéaste introduit des données dans son film qui sont propres à la pensée de l’artiste finlandaise. Celle-ci est invitée à se déployer en fragments épars dans The Birds à l’image des bribes de texte diffusées dans l’espace d’exposition. Mouvante, elle se répand dans le corps de l’œuvre et y introduit des affects qui, en venant bouleverser l’existence des personnages, proposent dans le récit des instances de dérèglement.

En venant les surprendre à son tour, le visiteur est invité à partager l’expérience de Melanie, à capter un texte que la barrière de la langue et le traitement sonore rend souvent pour lui inaccessible, au même titre que l’est pour le personnage hitchcockien le manège et les motivations des oiseaux.

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