Tuesday

2016




Boucle vidéo composée de 237 fragments, 3 heures 52.

Tuesday est un film rassemblant une série de montages vidéo qui engagent, par jeux de surimpression, un ensemble de dialogues inédits entre deux extraits d’un même fragment de Shining de Stanley Kubrick montrant successivement Dany (Dany Lloyd) déambuler en tricycle dans les couloirs de l’hôtel Outlook et Jack (Jack Nicholson) reprocher à son épouse Wendy (Shelley Duvall) de l’interrompre en plein travail d’écriture. Il se compose de 237 variations en référence au numéro de chambre qui retient l’attention de Dany dans le passage et précipite une nouvelle fois dans le récit l’apparition des jumelles assassinées.

De durées variables allant de quelques secondes à plusieurs minutes, chacun des 237 fragments repose sur un calage toujours différent des deux extraits confrontés. Cette articulation visuelle et sonore, toujours renouvelée au fur et à mesure que se déploie le film, constitue le principal programme esthétique de la proposition. Le montage originel du film de Kubrick n’est en effet jamais révisé dans Tuesday. Les choix opérés sur le début et la fin de deux passages présentés simultanément et l’effet de transparence systématiquement orchestré dans le processus de surimpression dans un rapport d’équilibre constant entre les deux fragments filmiques constituent les seules altérations apportées sur le matériau utilisé.

Présente dans chacune des 237 variations, la machine à écrire de Jack scande rythmiquement et musicalement les différentes variations. Bien que son contenu n’apparaisse jamais à l’image, le manuscrit tapé qui propose dans le film de Kubrick différentes déclinaisons d’un même contenu textuel, gouverne, à sa manière, l’esprit de la série. Il en propose une sorte de modèle à la fois structurel et esthétique.

Au même tire que Ink red! et Whirlloop, Tuesday peut apparaître comme l’allégorie d’un travail en cours d’élaboration buttant perpétuellement aux affres de la création et à la forme constamment remise en cause par son auteur avant d’être réorientée dans une autre direction. Présenté les uns après les autres, les montages se succèdent et s’égrainent comme une série de feuilles superposées, qui permet de révéler la suivante par effet de transparence.

En associant les extraits deux par deux, les montages pointent différents jeux de symétrie mis en œuvre au sein du film de Kubrick qui déterminent tout autant la construction des plans que leur durée, l’architecture de l’image que la dimension rythmique de l’œuvre, des effets d’échos d’ordre visuels que sonores. Ils soulignent la rigueur formelle de Shining et et contribuent, grâce au rapport d’équilibre visuel et sonore engagé entre les extraits, à en proposer différents types d’éclairages. La reprise des mêmes fragments travaille, au même tire que les effets de surimpression, à une forme de stratification temporelle qui englue et emprisonne les personnages à l’image de Delphine Seyrig dans la construction de Retour à Marienbad. Au même titre que les plans de Vertigo et les détails des Ménines dans Carlotta’s way et Returning Carlotta’s way, elle participe d’une logique de sédimentation et de répétition déjà à l’œuvre dans le film de Stanley Kubrick.

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