Swing 19

2012




Boucle vidéo de 02 mn 44.

Swing 19 construit une boucle d’un plan de The Scarlet Empress de Joseph von Sternberg montrant Catherine II (interprétée dans le film par Marlène Dietrich) poussée par ses dames de compagnie sur une balançoire.

Le montage du film enchaîne la scène à un plan de torture présentant une victime de l’oppression tsariste dont le corps est utilisé comme un battant dans la structure métallique d’une cloche. La transition ne s’opère toutefois pas au même moment sur le plan visuel que sur le plan sonore, les images de la scène de jeu commençant bien avant que ne cessent les tintements de la cloche provoqués par le supplicié, substitués rapidement au profit d’une musique joyeuse et entraînante. C’est ainsi que, bien que respectant la stricte synchronisation des images et du son de l’extrait de l’œuvre de Joseph von Sternberg, Swing 19 ne témoigne visuellement à travers ses jeux de va-et-vient au sein de la matière filmique, que de la scène d’allégresse où intervient Catherine II et ses suivantes, là où le son manifeste au contraire d’une dualité et d’une vraie ambivalence.

Le montage brode continuellement autour de cette rupture, introduisant des sonorités sourdes et grinçantes au sein l’évocation champêtre que contribue à accentuer la lecture à rebours du plan. Ces effet de décrochement manifestent de l’existence d’une dimension occultée, elle-même commentée visuellement par la manière dont l’image joue avec l’arrière plan au point de faire disparaître par moments le décor derrière le corps de l’impératrice, complexifiant ainsi considérablement l’approche d’une scène qui peut frapper à prime abord par le clacissisme de sa composition (le fragment rappelle certains tableaux du XVIIIe siècle dont les Hasards heureux de l’Escarpolette de Fragonard). En interrompant d’ailleurs, comme Swing 18, la continuité du mouvement de balancier, le montage invite à plusieurs reprises le corps de l’impératrice à rebondir dans l’espace ou à changer brusquement de direction dans des effets perturbateurs engageant leur part de violence diffuse.

Une certaine aspérité et gravité sont ainsi mis à l’œuvre, contribuant à commenter toute l’ambiguïté du pouvoir et toute la difficulté de l’exercice que représente celui de l’autorité.

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