Installation vidéo interactive pour vidéoprojecteur avec fauteuil à bascule et accessoires.
18 montages vidéo de 2 secondes environ.
Un fauteuil à bascule est mis à la disposition du visiteur. Les mouvements d’enfoncement ou de projection dans l’espace que lui fait adopter la personne qui vient s’y asseoir initient un double voyage dans le passé et dans l’avenir. Au gré de son balancement, l’objet confronte l’expérimentateur aux souvenirs qui revisitent son enfance ou aux angoisses que peut susciter l’idée de sa disparition. D’arrière en avant, d’avant en arrière, il épouse la dynamique de ses pensées et suit le flux de son parcours individuel.
Une paire de ciseaux à couture attachée par un ruban vert à la structure du fauteuil propose une référence figurative à La Couturière de Helene Schjerfbeck. En forme de grue au bec tranchant, elle fait également allusion à The Birds d’Alfred Hitchcock, convoqué sous la forme de dix-huit extraits au sein de l’installation. Comme la manipulation de la boîte de Pandore, le mouvement de la chaise conditionne l’apparition d’une série d’images filmiques, projetées sur un écran placé derrière le corps de la personne assise. Extraites des séquences qui précèdent et relatent dans The Birds l’attaque de l’école de Bodega Bay, elles établissent, à l’insu de celui qui les fait surgir, une correspondance entre son attitude et celle d’une Melanie pareillement représentée assise, à l’écart, en train de fumer une cigarette, en attendant que les enfants sortent de classe pour jouer dans l’aire de récréation.
Lorsqu’elles ne travaillent pas à cette identification entre le visiteur et le personnage, les images projetées procèdent d’un triple registre figuratif. Elles convoquent selon un mode d’apparition aléatoire la représentation de corbeaux en train d’évoluer dans le ciel, de se poser sur les barres métalliques d’une cage à singe ou de s’envoler de la structure sur laquelle ils étaient perchés. En référence à une métaphore que travaille Alfred Hitchcock dans The Birds, les oiseaux proposent autant d’expressions de la mélancolie du visiteur assis. Ils matérialisent des idées noires venant, au gré des mouvements des volatiles, l’atteindre momentanément, s’ancrer en lui ou s’en affranchir.
Apparaissant régulièrement dans les plans réunis au sein l’installation, la forme de la cage à singe où se rassemblent les corbeaux dans le film rappelle celle d’un gigantesque gâteau d’anniversaire. En s’y posant, les oiseaux viennent y figurer autant bougies. En surgissant derrière le corps du visiteur, les corbeaux marquent ainsi le passage des ans. Ils traduisent à leur manière ce basculement d’un âge à un autre de la vie, d’une étape à une autre de son existence que tend à transposer dans l’espace chacun des mouvements du fauteuil.
La présence de la grue (crane en anglais), du fauteuil et des lames des ciseaux, leur inscription au terme du parcours de l’exposition, le mouvement de va-et-vient que décrit le siège au moment où il est utilisé, comparable à la dynamique de battement des images picturales dans Autoportrait au métronome, voire le pivotement que doit accomplir le visiteur si, conscient de ce qui se passe dans l’installation, il cherche à surprendre les images qui se projettent derrière lui, sont autant d’éléments qui se réfèrent à la séquence de la découverte du cadavre de Mrs. Bates dans Psycho et de manière plus générale aux séquences d’agression du film de 1959.
Là où la référence à The Birds tend à privilégier un retour vers l’enfance, gouverne un mouvement de recul dans le Temps à travers la présence implicite des écoliers, celle à Psycho invite davantage le visiteur à se projeter vers l’instant qui correspondra à celui de sa mort. A la mélancolie de la Couturière de Helene Schjerfbeck, Psycho préfère articuler l’interrogation de chacun de nos devenirs dans une confrontation qui fait écho aux thèmes centraux de la série d’installations Épreuves du Temps.
